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"Elle" est un autre

Épisode 5 - L’étoile Bleue

Olivier … La patron de prog – Il m’avait proposé de boire un verre, pour y causer de mes papiers, ma série de l’été. Juste faire le point. On s’est retrouvé pas loin du boulevard Preuilly, dans un bistrot, PMU le Tiparillo.

J’ai pris un café. Noir.

  • Un café ?

Il a paru étonné. Okay... il tripatouille son oreillette bluetooth, rejette un appel d’un associé. Se met off par retour de texto. En mode l’Homme pressé.

Café.

On a échangé des banalités avec en arrière-fond l’arrivée du quartet.

Lui heureux de me revoir, me parle du nombre de clics, des commentaires, des retours qui ne sont pas trop mauvais, des réseaux sociaux, du taux de pénétration. Les dialectes d’un paradigme inconnu. Je fais mine d’y comprendre quelque chose.

Puis il me parle de mon style : le ton un peu particulier, le fait de mêler la vraie, dans des articles. C'est novateur.

Une interprétation de la réalité. Comme si tout cela était invraisemblable et réel à la fois. Tu comprends ?

Je dis rien. Je ne trouve pas. Mais bon...

  • Tu t’y connais en Instagram ? Je lui demande.

Il tique.

Voit mon vieux grelot, mon portable que je lui tends, Suis sur internet, je n’y comprends rien. Il me prend l’appareil commence par se connecter au WIFI du bar. En quelques secondes, il me connecte, me demande un mail, un mot de passe.

Je commande un troisième verre de blanc sec. Lui juste un coca.

  • Je croyais que tu détestais ça ?

Il termine d'installer Instagram, l’application...

Il me refile l’appareil, m’explique juste que je peux publier là, chercher là, aimer, commenter. Basta. Je serais me démerder.

Mon verre de blanc arrive, du Montlouis précise le patron. A vrai dire je m’en fous, je le remercie quand même.

Olivier qui revient au turbin : Tes papiers sont … Tu vois quoi ! Des trucs de fou, qui mêle la réalité, des émotions. Y’a un public, pas grand monde, mais ça marche pas mal.

Il en remet une couche. Trouve que je ne suis pas assez meanstream.

J’écoute à peine … Je cherche Sonia. Me souvient de sa page.

  • Faudrait te focaliser sur l’affaire, pas trop parler de ta vie, de cette Sonia. Tu comprends ? Dans le dernier post, cette fille... elle vient tout gâcher. Alors que l’ambiance sur les manifestations, les interventions des politiques, c‘était cool.

J’écoute plus.
J’ai décroché. Je passe les pages, tombe sur des images chelous.

  • Ron ?

Olivier...

  • Moins de perso, plus de ...tu vois, l’affaire sur “Elle”, ces graffitis, ton enquête, cette quête, c’est ça qui est chouette.

M’en fous aussi. Cette affaire, c’est maintenant l’affaire de tout le monde, des curieux, des touristes, des journalistes, des flics... 

  • Tu m’as laissé carte blanche.

Il me dévisage. Il cherche à me convaincre, j’avale mon verre de vin blanc, j’en prend un quatrième... je crois, je compte plus à vrai dire.

  • On me demande à te rencontrer.

Des journalistes encore, intrigués par mes articles, je suis celui qui a lancé l’affaire et le comble, je refuse dans parler autrement qu’à ma manière.

  • Non.
  • Ron...
  • Non.

Olivier qui bougonne, m’explique que cela donnerait un peu plus d’importance au site, que cela fait de la promo, du clic, du passage, qu’on pourrait faire évoluer le concept.

  • Cela me convient. Ma page, trois mille signes par semaine – Juste l’été. J’irai pas plus loin.

Cela me prend trop d’énergie. 

  • Et si tu ne l’a trouve pas ?
  • Qui ?
  • Elle ? Si tu ne trouves pas Elle ? Les lecteurs attendent de savoir ! Faut que tu te concentres sur l’investigation ? Capice ?

Vilà qu’il me baragouine en italien.

“Elle”. Une enquête. Une quête ? J’ai pas de réponse. Juste “Elle” maintenant n’est plus vraiment le cœur de mes préoccupations. Moi c’est Sonia. Et là... Sur l’écran Instagram, je crois que je l’ai trouvé.  Sa page. Je “follow”.

  • Ron ?

Olivier voit que j’ai décroché, il attend une réponse.

  • Je vais faire de mon mieux.

Cela semble le satisfaire à moitié. Il se relève, sort son Iphone,

  • On fait une photo
  • Quoi ?
  • Juste une photo,
  • Je veux pas de photo !
  • Juste une photo, on te verra pas, je peux la faire en contre-jour, à côté d’un “Elle” …

Je comprends qu’Olivier cherche à faire une mise en scène. Je soupire. On me verra pas ?

Juste une silhouette ! Il m’assure. Me rassure. Allez !

On se lève.

  • Tu fais quoi ?
  • On va faire ta photo, il y a un dessin pas loin. On de mes préférés.

Il me suit, tout excité, sort son téléphone, paye surtout les consommations, l’ardoise est salée.

 

On se retrouve devant la Jeune chambre économique de Tours. L’étoile bleu, j’explique. Un des bordel de Tours du XIX ème siècle.

Sur la façade, un Elle, un slogan surtout, “Un corps vendu, une âme perdue” … un hommage, aux putains à bordel, comme celui justement de l’étoile bleue.

Olivier connait.

Il est déjà en train d’ajuster son téléphone, me demande de prendre la pose. Ma poche tremble, mon téléphone vibre. Un message. Instagram. Sonia : “et si on se voyait ?”

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