Cours d’histoire de l’art. “Être et paraître”
Au 19e siècle, le portrait est un genre florissant. Chaque bourgeois veut son portrait, bien placé sur les murs du Salon parisien, pour servir sa renommée et sa réussite. La Révolution industrielle engendre une nouvelle clientèle dont les goûts singent ceux des aristocrates de l’Ancien Régime.
Le portrait devient un lieu d’expérimentation pour les artistes qui l’ennoblissent au point parfois, à l’instar de Jean-Auguste Dominique Ingres, de l’élever au rang de la peinture d’histoire.
La province n’est pas en reste et les artistes des territoires voient aussi dans le développement du portrait un moyen de vivre de leur art ou de se faire connaître de commanditaires fortunés, soucieux d’être reconnus comme des notables locaux.
L’invention de la photographie en 1839 va entraîner une autre révolution, tant économique qu’esthétique. Les classes plus modestes peuvent enfin accéder au portrait, souvent le dernier, celui où l’on immortalise l’être cher sur son lit de mort, ou plus réjouissant la photographie de mariage ou de famille. La ressemblance, autrefois principal qualité recherchée dans un portrait, est désormais un enjeu pris en charge par l’exactitude mécanique de la photographie. Les peintres et sculpteurs peuvent alors se libérer de ce diktat pour aller vers de nouvelles formes et expérimentations. C’est ainsi que le genre du portrait entre dans la production des avant-gardes artistiques, des impressionnistes aux cubistes, jusqu’à l’abstraction. Le portrait n’est alors plus physique mais psychologique et sensoriel, évocateur d’une personnalité.
Aujourd’hui, dans l’art contemporain, toutes les écoles esthétiques se côtoient, le figuratif revient aussi chez les jeunes générations de peintres, renouant avec les codes du 19e siècle pour mieux les détourner.
Par Hélène Jagot, directrice des Musées-Château de Tours